Un an après le début de la crise sanitaire, où en sommes-nous ?

La situation en Afrique de l’Ouest Bonjour. Je suis Sylvain Gomez, Chargé de projet et coordinateur des actions en Afrique de l’Ouest. Je suis basé à Ouagadougou, au Burkina Faso, que je n’ai pas quitté depuis le début de la crise en mars 2020, excepté pour 2 missions au Togo en décembre 2020 et en mars 2021. Comment est gérée la crise aujourd’hui dans les pays d’intervention ? Dans le cadre de notre travail et dans la vie de tous les jours, nous veillons à poursuivre l’application des gestes barrières comme la limitation de contacts pour les salutations, le port du masque dans les endroits clos et le lavage régulier des mains. Ici au Burkina Faso, les personnes cas contacts et les personnes avec symptômes sont testées gratuitement. Les contrôles sont plus stricts au Togo : le test Covid est obligatoire à l’entrée dans le pays, des patrouilles anti-covid vérifient le port du masque dans les transports et les lieux publics, la musique est interdite dans les maquis pour limiter les rassemblements, une application de traçage par téléphone a été mise en place. Il y a également des mises en quarantaine régionale en cas de flambée du nombre de cas (comme pour la région des Savanes au Nord Togo en février dernier). Il y a de la sensibilisation mais aussi de la répression avec des amendes. Les mesures de prévention semblent davantage intégrées et appliquées par les populations dans les pays côtiers où nous intervenons (Togo, Bénin) qu’au Burkina Faso. L’UEMOA (Union Economique et Monétaire Ouest Africaine) réunie récemment a décidé d’uniformiser les modalités et la validité des tests Covid. La réouverture des frontières terrestres fin mai a aussi été évoquée. Sur le terrain, lors des réunions avec les éleveurs bénéficiaires de nos projets, nous avons l’avantage d’être sous un arbre, un hangar, en milieu chaud, sec, ouvert et aéré, où nous pouvons nous asseoir à plus de 1,5 m les uns des autres. Quelles sont les conséquences de la pandémie et les adaptations faites par ESF ? • A court terme La crise sanitaire a eu un fort impact social et économique. Les flux humains et de marchandises ont été freinés même si les frontières sont poreuses. L’argent rentre moins dans les ménages. Pour le secteur du tourisme, la crise sanitaire est venue s’ajouter à la crise sécuritaire liée au terrorisme. Pour les éleveurs accompagnés, l’approvisionnement en intrants (alimentaires ou sanitaires) s’est débloqué dans l’ensemble. Ils sont davantage concentrés sur la période de sécheresse (soudure) maintenant. Il faut cependant noter une augmentation globale des prix. La préparation des campagnes agricoles ou l’achat d’aliments pour les animaux pourraient s’avérer difficiles. Nous continuons à travailler sur la mise en place de circuits d’approvisionnement en aliments et en intrants pour les cultures (fertilisants et pesticides biologiques). La promotion de pratiques agroécologiques, comme la production de compost à partir des déjections animales ou la production de traitements biologiques pour les cultures, permet de répondre aux besoins des paysans. Les projets mis en place soutiennent aussi l’élaboration d’aliments à base des ressources locales. Notre challenge maintenant : intensifier la production de ces aliments confiés à des acteurs privés ou des organisations paysannes. Le travail mené avec les vétérinaires et les auxiliaires d’élevage villageois nous a permis de maintenir la santé des cheptels. Ces auxiliaires d’élevage tout comme les responsables des organisations paysannes ou des éleveurs référents ont aidé à maintenir le contact avec les bénéficiaires lors des périodes où la circulation sur les zones d’intervention devenait difficile. • A moyen terme Ce travail sur l’alimentation animale, les intrants agricoles et l’appui aux vétérinaires de proximité devraient aider à faire face à l’apparition de crises futures. La gestion environnementale est aussi de plus en plus au cœur de nos projets. Nous souhaitons diffuser les bonnes pratiques développées dans le cadre d’activités pilotes (comme les champs-écoles) pour un changement d’échelle des modes de production. Nous souhaitons aussi renforcer notre approche « Santé Globale » qui considère la gestion des ressources à l’échelle de l’écosystème. Une bonne gestion de l’ensemble des ressources productives (terre, eau, flore, faune, animaux d’élevage…) limite le passage de virus des animaux sauvages aux animaux d’élevage et à l’Homme. Sur le plan de la commercialisation des produits issus des élevages (viande ou lait), ESF continue son appui à la structuration de circuits courts de commercialisation pour une consommation de proximité et donc un maintien du chiffre d’affaires des éleveurs malgré la crise sanitaire. Sylvain Gomez, Responsable de projets et Coordinateur régional d’Afrique de l’Ouest La situation au Maroc Bonjour. Je suis Hassania KANOUBI, présidente de l’Association Rosa pour le développement de la femme rurale au Maroc. A ce jour, quelles sont les principales conséquences de la pandémie sur le plan économique et social pour la population ? Rosa travaille depuis 2010 sur l’élevage de chèvres et la fabrication du fromage. Elle aide plus de 200 éleveuses par ses activités de suivi des formations techniques et d’accompagnement de proximité des éleveuses en milieu rural. Ces activités ont été fortement impactées par les mesures restrictives prises pour freiner la propagation du virus, empêchant les déplacements de l’équipe, les ventes des fromages, etc. Cette crise sanitaire a également très rapidement touché l’économie des membres de la coopérative Corosa : la fermeture de la fromagerie pendant 1 an a entrainé une perte des stocks de fromages ainsi que la source de leur revenus mensuels.  Corosa a en effet subi la crise du secteur touristique : le Maroc a rapidement fermé ses frontières, stoppant le tourisme extérieur. Le couvre-feu national a également arrêté le tourisme national. Or la fromagerie vend une grande partie de ses produits aux structures touristiques de la région de Ouarzazate, que ce soit des hôtels, chambre d’hôte ou restaurant. En outre, la majorité des femmes travaillent dans l’économie informelle. Cela signifie que leur revenu est précaire et qu’elles ne peuvent bénéficier des dispositifs mis en place par l’Etat. Les femmes éleveuses se sont trouvées isolées dans leurs foyers pendant le confinement. Aucun déplacement