Pour qu’ils vivent ensemble de l’élevage, en sécurité

A la frontière sud-est du Parc national de Kafue, plus de 6 000 personnes vulnérables comptent sur l’élevage pour se nourrir, cultiver et dégager des revenus. Le projet « Des Lions et des Vaches », mené par notre partenaire Melindika, vise à sécuriser les revenus des éleveurs, favoriser la gestion raisonnée des pâturages et apaiser la cohabitation humains-faune sauvage. Les avancées depuis un an sont encourageantes. Sur la santé animale, le projet a renforcé les compétences et la présence de relais villageois, ou Agents Communautaires de Santé Animale (ACSA), en suivant les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé Animale (OMSA). Afin de toucher le plus possible de familles, 4 émissions de radio en langue locale ont sensibilisé aux gestes essentiels de prévention sanitaire et de gestion des troupeaux. Les fortes audiences et les nombreux appels d’éleveurs témoignent de l’intérêt et de la pertinence de ce média. Enfin, afin de mutualiser les dépenses vétérinaires, ESF a appuyé la reconnaissance légale des coopératives chargées de ces achats négociés. La population a été fortement impliquée dans la refonte de son utilisation des ressources locales. 6 comités villageois de gestion pastorale ont réalisé des cartographies participatives définissant les ressources, leurs usages, les risques tels que les feux de brousse et le surpâturage. De ces diagnostics ont émergé des bonnes pratiques et des règles collectives. Sur les conflits homme–faune, une enquête auprès d’éleveurs et chefs de village a permis de définir un dispositif de protection avec des enclos renforcés et des chiens de garde. Une série d’émissions radiophoniques a sensibilisé les communautés à la cohabitation pacifique. Nous restons mobilisés aux côtés de Melindika pour soutenir au total 350 familles d’éleveurs dans leur lutte pour la sécurité alimentaire. “Je suis éleveuse mais aussi assistante communautaire en santé animale au Centre de soutien à l’élevage. J’ai suivi un parcours de formation pour faciliter l’accès aux soins vétérinaires. On fournit des médicaments, des compléments et des conseils pour soigner les troupeaux. En période de sécheresse, les compléments sont essentiels pour le bétail. Je suis heureuse de transmettre mes nouvelles connaissances et d’aider d’autres éleveurs en difficulté.” Otria Samalumo Eleveuse de vaches
Au cœur du terrain – Le marrainage redonne espoir aux jeunes femmes rurales

Au Maroc comme au Burkina Faso, le manque de formation est un facteur aggravant la marginalité et la pauvreté des jeunes femmes rurales. Elles ont peu accès aux moyens de production et à la connaissance alors qu’elles assurent la plus grande part de la production de subsistance. Le marrainage favorise la transmission de savoirs, de savoir-faire et la solidarité entre femmes. Au Maroc, 3 femmes sur 4 âgées de 15 à 24 ans sont sans éducation, ni formation, ni emploi *. Au sud-est du pays dans la région du Drâa-Tafilalet, pour le projet Envol des femmes, ESF met en place avec son partenaire ROSA un programme de marrainage porté par des éleveuses expérimentées qui accompagnent des jeunes femmes débutantes en élevage. Ces jeunes femmes font face à de lourds obstacles. D’une part, elles sont peu représentées dans les groupements villageois alors qu’elles participent souvent aux soins des animaux. Elles manquent d’espace d’expression et n’ont ni accès aux ressources financières ni l’autorisation d’entreprendre des activités rémunératrices de manière indépendante. D’autre part, certaines femmes plus âgées se montrent réticentes à l’idée d’impliquer davantage les plus jeunes dans les groupements ou les élevages. Le programme de marrainage vise à renforcer les compétences techniques des jeunes, favoriser leur intégration dans les activités économiques et sociales locales et améliorer le dialogue entre les générations. Pour chaque marrainage, 3 à 4 filleules sont associées à une marraine, sélectionnée par leurs soins selon son expérience en élevage, sa capacité d’écoute, sa pédagogie et sa disponibilité. La marraine s’engage alors à offrir un accompagnement à travers des visites régulières pour évaluer les progrès des filleules, identifier leurs besoins spécifiques et apporter des conseils personnalisés. Les jeunes femmes plus novices expriment très vite une plus grande confiance dans leur capacité à gérer leur élevage, comme le partage Habiba Hidi, éleveuse filleule. L’expérience de marrainage est également valorisante pour les femmes plus âgées qui transmettent leurs savoirs et renforcent leur rôle au sein du village. “Nous échangeons souvent avec les autres éleveuses et les marraines du village. Cette année par exemple, une de mes chèvres en début de gestation mangeait peu, j’ai donc demandé conseil à ma marraine. Elle m’a suggéré un remède traditionnel pour stimuler l’appétit. Depuis, ma chèvre va mieux et moi aussi. Mon élevage est si important pour ma famille !” Habiba Hidi Eleveuse Compte tenu de l’impact encourageant au Maroc, ESF initie son partenaire APIL au Burkina Faso à l’approche marrainage en l’adaptant aux spécificités socio-culturelles locales. L’organisation sociale burkinabé est très patriarcale et les femmes sont victimes de discriminations pour le partage et le contrôle des ressources et des responsabilités. Mené depuis 3 ans, le projet d’élevage laitier « La Voie Lactée de l’Oubritenga » a permis à 150 femmes d’acquérir des compétences clés en élevage, en organisation collective et pour la vente du lait de leurs animaux. En 2025, ESF souhaite soutenir 75 nouvelles bénéficiaires dont la situation de vulnérabilité a été aggravée par le déplacement de leurs familles qui ont fui des conflits armés au nord du pays**. L’approche a les mêmes objectifs et repose sur le même principe de mentorat qu’au Maroc. Les marraines ont d’abord été sélectionnées et formées à leur rôle d’accompagnantes. Les éleveuses filleules ont choisi leur marraine en fonction de leur proximité et affinités. A présent, les marraines conseillent les filleules apprenantes lors de réunions et visitent leur élevage également appuyé dans le cadre du projet. Grâce au marrainage, les savoirs et les savoir-faire sont préservés et transmis, les femmes gagnent en estime de soi et en confiance, sont plus solidaires et renforcent leur place dans la société. Demain, les filleules formées auront la possibilité de devenir les marraines de nouvelles éleveuses dans le besoin. * l’Observatoire National du Développement Humain et de l’UNICEF (2022) ** Depuis 2014, le Burkina Faso connait une crise sécuritaire sur son territoire.
Contexte alarmant pour la solidarité internationale

Alors que les États-Unis finançaient 45 % de l’aide humanitaire mondiale, la suspension par l’administration Trump de la majorité des programmes d’aide publique au développement portés par l’agence USAID a provoqué un choc majeur. Cette décision brutale a conduit à l’arrêt immédiat de nombreux projets dans 38 pays, privant des populations déjà vulnérables d’un soutien vital face aux crises et conflits. Toute la chaîne de l’aide est ainsi affectée par ces suspensions, qu’il s’agisse des ONG locales, internationales ou des agences de l’ONU. L’interdépendance entre ces acteurs dans l’acheminement de l’aide humanitaire provoque aujourd’hui des effets en cascade. Dans un contexte où les besoins humanitaires ne cessent d’augmenter avec plus de 307 millions de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire en 2025, cette réduction drastique compromet gravement à plus long terme la capacité d’intervention des ONG, souvent dépendantes de ces fonds. En parallèle, la coopération internationale, fondée sur la solidarité et la mutualisation des ressources, se trouve impactée, rendant plus difficile la coordination des réponses aux crises mondiales. Les progrès réalisés ces dernières années en matière d’accès à la santé et de lutte contre les épidémies, de scolarisation, de lutte contre la malnutrition ou encore de réduction des inégalités, notamment à l’égard des femmes et des filles, sont ainsi fragilisés. Dans certains cas, ce sont des vies humaines qui sont directement menacées. En France, la Loi de Finances 2025 annonce une baisse de 2,1 milliards d’euros (-37 %) du budget de l’Aide Publique au Développement qui revient à un niveau inférieur à celui de 2021. Le dispositif INITIATIVES OSC de l’AFD, dont Elevages sans frontières bénéficie pour certains de ses programmes, devrait connaître une baisse d’au moins – 42 %, passant de 190 millions à 110 millions €. Problème, le dispositif était déjà obstrué avec de nombreuses demandes non pourvues et des financements initialement prévus en 2024 puis reportés en 2025 à la suite d’une première coupe budgétaire. Ces restrictions impactent profondément les associations de solidarité internationale financées par la France. Au-delà des risques pour leur survie, cette situation compromet leur aide aux plus démunis et met en péril les efforts collectifs pour répondre aux défis majeurs de développement durable.